LES INFECTIONS A MENINGOCOQUES EN FRANCE EN 1995
Les cas d'infections à méningocoque (IM) survenus en 1995 sont présentés en parallèle avec les 3 804 cas déclarés pendant les 10 années précédentes (1985-1994).
Modalités et qualité du système de surveillance
- Objectifs de la déclaration obligatoire
La déclaration permet de mettre en place précocement les mesures de prévention dans l'entourage des cas (circulaire DGS/PGE/1C n°79 du 5/2/90). Elle a aussi pour objectif de connaître la
fréquence,
les tendances et les principales caractéristiques épidémiologiques de ces infections, ainsi que l'évaluation des mesures de prévention. - Définition de cas
Le critère de déclaration est l'isolement de Neisseria meningitidis dans le liquide céphalo-rachidien (LCR) et/ou le sang, ou la présence d'antigènes solubles de N. meningitidis dans le LCR, le sang ou les urines. - Qualité du système de surveillance
En 1995, 310 cas d'IM ont été déclarés : 286 (92%) fiches de déclaration ont été reçues par la suite. Parmi eux, 261 (91%) répondaient aux critères de déclaration. Proportion de fiches reçues
La proportion de fiches de déclaration transmises par les DDASS s'est accrue progressivement depuis 1985 passant de 60% à 92% [fig. 1].
Respect des critères de déclaration
En 1995, 9% des cas parmi les fiches reçues (25 cas) ne répondaient pas aux critères de déclaration en raison d'une absence de confirmation bactériologique (dont 10 purpura fulminans et 6 décès). La proportion de cas exclus est stable autour de 8% depuis 1989 [fig. 1].
Exhaustivité et représentativité de la déclaration
L'exhaustivité et la représentativité ont été évaluées en 1989 et 1990 par la méthode de "capture-recapture" [1]. Le taux d'exhaustivité était de 71% pour l'ensemble des cas déclarés et de 53% pour les fiches de déclaration transmises au niveau national. Les données de la déclaration étaient représentatives par trimestre et par sérogroupe. Par contre, le taux de déclaration était légèrement plus élevé chez les 5-24 ans (60%) que dans les autres tranches d'âge (44%). L'exhaustivité a été estimée par la même méthode en 1991/1992 à 56% (données non publiées).
Délai de déclaration
61% des cas sont déclarés dans la semaine et 91% dans les 3 semaines après le début de la maladie. Ce délai n'a pas varié par rapport à 1993 [fig. 2].
Principales caractéristiques épidémiologiques
L'incidence
des IM déclarées est de 0,53 pour 100 000 habitants en 1995. Elle est à son niveau le plus faible depuis 1945 [fig. 3]. En tenant compte d'une exhaustivité de la déclaration de 70%, l'incidence réelle peut être estimée à 0,75/100 000. La France se situe dans les pays européens à faible taux
d'incidence
(incidence > 2/100 000 dans les pays du Nord de l'Europe) [2]. - Répartition par âge
Les taux
d'incidence
diminuent avec l'âge [fig. 5] [fig. 6].
l'incidence
des IM chez les enfants de moins d'un an dans les deux sexes est en hausse en 1995 (7,6/100 000 contre 4,9 en 1994, p< 0,05). Cette tendance sera à confirmer en 1996. -
Répartition par sérogroupe
Le sérogroupe B est dominant en France, et sur les 10 dernières années il représente 62% des cas (74% en 1995). Un légère augmentation est observée entre 1994 (147 cas) et 1995 (163 cas). Après un pic en 1992, le nombre de cas provoqués par le sérogroupe C a diminué pour retrouver le niveau de 1985 [fig. 7]. Cette diminution depuis 1993 concerne toutes les tranches d'âge et les deux sexes. Le sérogroupe A a pratiquement disparu en France [tab. 1]. - Confirmation du diagnostic
Un méningocoque a été isolé dans le LCR seul chez 71% des cas, dans le sang chez 15% des cas et à la fois dans le sang et le LCR chez 20% des malades. Les antigènes solubles sont recherchés de façon croissante depuis 1985 (6% des cas) pour atteindre 51% en 1995. En l'absence d'isolement du méningocoque, cette recherche est à l'origine de 4% des diagnostics en 1995. - Pronostic de la maladie
Un purpura fulminans est observé dans 21% des cas (23% en 1985-1994). Il est significativement plus fréquent dans les infections à sérogroupe C et dans les formes septicémiques [tab. 2]. Des séquelles cutanées ou neurologiques précoces ont été signalées chez 12 cas en 1995.
La létalité a été de 10%. Parmi les décès, 73% sont survenus dans les 2 premiers jours de la maladie. Sur la période 1985-1995, la létalité est significativement plus élevée en cas de purpura fulminans, de forme septicémique, de sérogroupe C, et aux âges extrêmes de la vie [tab. 3] [fig. 9].
Cas groupés
En 1995, 5 foyers de cas groupés ont été signalés :
- Un foyer en milieu familial était constitué de 2 cas coprimaires (survenus à moins de 48 heures d'intervalle) ; le méningocoque n'a été isolé que chez un des 2 cas (sérogroupe inconnu).
- Un foyer comportant 2 cas secondaires est survenu en milieu scolaire (délais de 25 jours pour les 2 cas), avec un méningocoque B isolé chez le cas index et un des cas secondaires (sérogroupe inconnu pour l'autre cas) ;
- Dans les 3 autres foyers, dont deux en milieu familial, un cas secondaire est survenu après un délai respectivement de 2, 37 et 150 jours. Le méningocoque était du sérogroupe B dans tous les cas sauf un, où il est inconnu.
Tous les cas secondaires sont survenus chez des enfants de 2 à 14 ans. En dehors de l'année 1993, la proportion de cas secondaires est stable depuis 1990 [tab. 4].
Prévention dans l'entourage des cas
- Nombre de personnes
En 1995, dans l'entourage des cas en milieu familial, 1 201 personnes ont reçu une chimioprophylaxie et 108 une vaccination préventive ; en collectivité, 4 483 et 706 respectivement en ont bénéficié. La réalisation de la vaccination préventive en cas de sérogroupe A ou C a diminué en 1995. [fig. 10] - Antibiotiques utilisés
Lorsque l'antibiotique prescrit en chimioprophylaxie a été précisé (76 cas en collectivité, 193 cas en milieu familial), il s'agissait dans 97% des cas de rifampicine (2 cas de spiramycine en collectivité, 6 cas en milieu familial). La spiramycine a été également prescrite chez quelques personnes lors de contre-indication à la rifampicine. Aucun autre antibiotique n'a été prescrit. La prescription de rifampicine a augmenté par rapport aux années précédentes : de 79% en 1991 à 93% en 1993 et 97% en 1995.
Références
[1] Hubert B., Desenclos J-C. Evaluation de l'exhaustivité et de la représentativité d'un système de surveillance par la méthode de capture-recapture. Application à la surveillance des infections à méningocoque en France en 1989 et 1990. Rev Epidém Santé Publ 1993; 41: 241-9. Retour au texte
[2] Connoly M., Noah N. Surveillance of bacterial meningitis in Europe 1994. King's College Eds. Londres (GB). Retour au texte
FIGURES
Figure 1 : Proportion de fiches reçues et de cas confirmés, de 1985 à 1995. Retour au texte
Figure 2 : Distribution cumulée du délai de déclaration 1993-1995. Retour au texte
Figure 3 :
Incidence
des cas déclarés d'IM en France de 1945 à 1995. Retour au texte
Figure 4 :
Distribution mensuelle
des cas
d'IM : moyennes 1985-1994 et 1995. Retour au texte
Figure 5 :
Distribution
par âge des cas d'IM en 1995. Retour au texte
Figure 6 :
Incidence
des IM par classes d'âge
- 1985-89, 1990-94 et 1995. Retour au texte

Figure 7 : Evolution des sérogroupes de méningocoques en France, 1975-1995. Retour au texte
Figure 8 : Répartition des sérogroupes par âge, 1990-1995. Retour au texte
Figure 9 : Taux de létalité selon l'âge et la présence ou non d'un purpura fulminans. France 1985-1995. Retour au texte
Figure 10 : Prévention dans l'entourage des cas, 1985-1995. Retour au texte
TABLEAUX
Tableau 1 : Répartition par sérogroupe des méningocoques, 1985-1995. Retour au texte

Tableau 2 : Facteurs de risque de purpura fulminans (PF) France, 1985-1995. Retour au texte

Tableau 3 : Facteurs de risque de décès, 1985-1995. Retour au texte

Tableau 4 : Nombre de foyers, de cas secondaires et coprimaires*, France, 1988-1995. Retour au texte
